L’ESS doit faire ses preuves en matière de vieillissement

Face aux enjeux du vieillissement démographique, l’économie sociale et solidaire a de nombreux atouts : place des mutuelles

Face aux enjeux du vieillissement démographique, l’économie sociale et solidaire a de nombreux atouts : place des mutuelles dans la protection sociale, place du secteur associatif dans l’hébergement et les soins à domicile, innovateurs sociaux dans la santé… Mais, confrontée aux assauts du secteur privé et à la transition numérique, elle ne doit pas se contenter d’affirmer sa différence mais apporter des preuves de sa plus-value. De nouveaux outils de mesure sont nécessaires.

« La France maltraite ses personnes âgées », estime le sociologue Bernard Ennuyer, en appuyant sur le fait qu’il n’y a pas de réelle politique publique du vieillissement (« la loi sur l’adaptation de la société au vieillissement ne définit pas qui sont les vieux ! ») et que la société oublie leur rôle économique dans la cohésion sociale (aide financière aux enfants, garde des petits-enfants, aide au maintien à domicile des parents).

La transformation majeure, c’est celle des cycles de vie

Pour autant, l’ESS a-t-elle une attitude différente vis-à-vis des seniors et de toutes les problématiques qui s’imposent à eux ? C’est ce qu’ont cherché à savoir les participants à la rencontre de l’Université populaire et citoyenne, organisée cette semaine dans le cadre de la Chaire ESS du Cnam sur le thème : « Économie sociale et solidaire et vieillissement, enjeux et perspectives ».

Un intitulé qui reprend peu ou prou celui du rapport publié en 2016 par la Fonda et Futuribles. Présent au Cnam, Yannick Blanc, président de la Fonda, a évoqué les apports qui pourraient être ceux de l’ESS : « face aux approches marchandes de la Silver Economy, nous nous sommes demandés si l’ESS ne pouvait pas porter des alternatives. L’ESS met en avant ses spécificités (non-lucrativité, gouvernance, participation des usagers) non seulement dans les institutions qui s’occupent des soins et de la santé, mais aussi dans les activités qui concernent les jeunes seniors. En termes de prospective, nous pensons qu’il n’est plus possible de parler de catégories d’âge, mais de parcours des individus, car la transformation majeure du vieillissement démographique, c’est celle des cycles de vie ».

Plus de 300 initiatives de l’ESS liées à la thématique de « l’or gris »

Pour y répondre, les acteurs de l’ESS fournissent des réponses nombreuses et locales. Le rapport de la Fonda et de Futuribles a ainsi repéré plus de 300 initiatives de l’ESS liées à la thématique de « l’or gris », comme les Villages Répit Familles pour les aidants, la Scic Innovillâge dans la Creuse, les Intergénéreux (devenus le programme Mona Lisa avec le service civique), Duo for a Job (mentorat intergénérationnel financé par les Social Impact Bonds), etc.

En-dehors du secteur sanitaire et social, l’ESS est aussi particulièrement positionnée dans le secteur de l’habitat et de l’hébergement. Lors de cette même réunion au Cnam, Aline Di Carlo, assistante sociale et doctorante, a présenté un panorama de l’habitat alternatif pour les personnes âgées : béguinage, cohabitation intergénérationnelle (comme avec le Pari solidaire), domicile partagé, habitat participatif. « La particularité de ces expériences est d’associer pleinement habitants et aidants au projet et à la vie du projet, comme dans les conseils de vie », souligne Aline Di Carlo.

Il y a une vraie différence entre un Ehpad associatif et un Ehpad lucratif

Mais quand il s’agit d’évaluer les plus-values des solutions apportées par l’ESS au vieillissement, les réponses sont plus complexes…

Pour Bernard Ennuyer, il n’y a pas de doute qu’il y a une vraie différence entre un Ehpad associatif et un Ehpad lucratif ; il constate aussi que les soins à domicile portés par des associations ont une vraie dimension sociale.

Selon Yannick Blanc, c’est bien autour de la question de l’évaluation que l’ESS doit faire ses preuves : « les objectifs du privé lucratif ne sont pas ceux du secteur associatif. Et pourtant c’est le secteur privé qui mesure les plus-values dans le secteur sanitaire et social.

Pour parvenir à mettre en avant l’impact de l’ESS, par exemple avec ses apports non monétaires, la Fonda vient de lancer une nouvelle étude avec l’Avise et le Labo de l’ESS afin de construire de nouveaux instruments de mesure ».

C’est vraisemblablement à cette condition que l’ESS pourra consolider sa place dans les structures impliquées dans l’accompagnement du vieillissement démographique.

 

Source : http://www.gazette-sante-social.fr/40318/less-doit-faire-ses-preuves-en-matiere-de-vieillissement